Cour d’appel de Toulouse, 4eme Chambre Section 2, Arrêt N°2022/508 du 16 décembre 2022, N° affaire : 21/01896, N° RG 21/01896.
Un employeur ne peut pas refuser à un salarié un deuxième congé de paternité quelques mois après le premier, en se fondant sur une présomption de polygamie, juge la Cour d’appel de Toulouse dans un arrêt du 16/12/2022. Ce motif est discriminatoire.
• Un salarié est embauché le 02/11/2016 en qualité de chauffeur super poids lourd. Il est licencié pour faute grave le 24/04/2018. Le salarié saisit le CPH afin de contester son licenciement et énonce, notamment, que l’employeur a abusivement refusé de lui accorder un congé paternité.
• Le CPH fait droit à sa demande. Il juge que le licenciement du salarié est nul pour discrimination.
• La Cour d’appel confirme le jugement. Elle rappelle l’article L.1132-1 du Code du Travail, selon lequel un salarié ne peut pas être discriminé notamment en raison de ses mœurs, de son orientation sexuelle ou de sa situation de famille. Elle constate que l’employeur a refusé au salarié sa demande de prise de congé paternité, au motif qu’il aurait eu un premier enfant né d’une autre mère dans les mois précédant la naissance de son second enfant. L’employeur a également émis un jugement de valeur sur la vie familiale du salarié et ses mœurs, en lui précisant qu’« en France, la polygamie n’existe pas ». La Cour juge que le refus du congé paternité par l’employeur repose sur un motif discriminatoire..
ÉCLAIRAGE : Régime juridique applicable
Article L.1132-1 du Code du Travail :
Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de nomination ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27/05/2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d’horaires de travail, d’évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d’un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d’alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d’alerte, au sens, respectivement, du I de l’article 6 et des 1° et 2° de l’article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 09/12/2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
Article L.3142-1 du Code du Travail :
Le salarié a droit, sur justification, à un congé :
Pour son mariage ou pour la conclusion d’un pacte civil de solidarité ;
Pour le mariage d’un enfant ;
Pour chaque naissance pour le père et, le cas échéant, le conjoint ou le concubin de la mère ou la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité ;
Pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption. Ce congé peut être pris dans un délai fixé par décret ;
Pour le décès d’un enfant, du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur ;
Pour l’annonce de la survenue d’un handicap, d’une pathologie chronique nécessitant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer chez un enfant.
Article L.1225-35 nouveau du Code du Travail (extrait) :
Après la naissance de l’enfant, le père salarié ainsi que, le cas échéant, le conjoint ou concubin salarié de la mère ou la personne salariée liée à elle par un pacte civil de solidarité bénéficient d’un congé de paternité et d’accueil de l’enfant de 25 jours calendaires ou de 32 jours calendaires en cas de naissances multiples.
Le congé de paternité et d’accueil de l’enfant entraîne la suspension du contrat de travail.